Eléments d’actualisation pour la France
Bernard GazierLes données disponibles pour la France à la date de l’exposé (le 23 avril) donnaient en ce qui concerne les répercussions sur le chômage en France des ordres de grandeur très faibles et peu crédibles. Elles avaient été critiquées au cours de la vidéoconférence. D’autres données, qui concernaient notamment l’effondrement de l’intérim, passé de 700.000 équivalents temps plein à 120.000 équivalents temps plein, montraient un processus accéléré de destruction d’emplois, qui devait se retrouver dans les chiffres du chômage malgré le rôle d’amortisseur joué par les inscriptions au chômage partiel.
Depuis le 23 avril des données de meilleure qualité sont arrivées et font état, pour le mois de mars 2020, d’une croissance de 7,1% des demandeurs d’emploi de catégorie A (les chômeurs recherchant un emploi à temps plein et immédiatement disponibles), soit 250000 chômeurs inscrits de plus. Deux processus ont conjugué leurs effets : une augmentation des inscrits et un très net ralentissement des sorties vers l’emploi. Cet ordre de grandeur a frappé les esprits. Il se révèle toutefois très en-dessous de ce qui se prépare. En effet, on n’y retrouve pas encore l’essentiel des effectifs issus de l’intérim (600.000 pertes d’équivalents temps plein), ni les salariés en fin de Contrats à Durée Déterminée, ni les indépendants ayant perdu leur clientèle.
Les choses vont sans doute s’aggraver lorsqu’au mois de juin prendra fin la protection du chômage partiel, valable en principe pour trois mois (même si quelques renouvellements seront accordés). La déferlante du chômage risque alors de se produire en deux vagues : celle de la fin du printemps, résultant des processus que l’on vient d’évoquer, et celle de la rentrée, au moment où les entreprises feront leurs comptes et choisiront pour certaines de réduire leurs effectifs. Concrètement, un restaurant contraint d’espacer ses clients risque de perdre la moitié de sa capacité d’accueil à supposer qu’il retrouve rapidement sa clientèle usuelle, et donc de supprimer la moitié de ses effectifs.